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Les cordes des luths d'autrefois


De nos jours, presque tous les joueurs de luth tendent sur leurs instruments des cordes de nylon (nylon plein, comme le fil de pêche, mais rectifié ou nylon filé, c’est-à-dire alourdi par un fil de métal, le trait, enroulé à l’extérieur de la corde). Cette pratique est très récente puisque les cordes de nylon ne firent leur apparition que dans les années 1950; tous les joueurs de luth des temps passés n’ont connu que les cordes de boyau ; or la différence de sonorité entre le nylon et le boyau est très importante. Chaque luthiste, chaque amateur de luth devrait avoir entendu au moins une fois un luth monté entièrement en boyau. Il saurait alors que le son du luth que nous connaissons aujourd’hui est assez différent de celui qu’ont entendu nos ancêtres.


QUELLES CORDES UTILISAIT-ON AVANT L’INVENTION DES CORDES FILÉES

Jusqu’à l’invention des cordes filées sur boyau (1), les musiciens, qu’ils jouassent du luth, de la viole ou du violon ont utilisé un type particulier de corde de boyau nommé en anglais “catlin” (pas de source en français pour ce mot). Chacun sait que pour obtenir des sons graves il faut soit allonger la longueur vibrante de la corde soit tricher en augmentant son poids donc son diamètre (masse linéique), or dans le cas du boyau, les cordes de très fort diamètre utilisées pour les basses d’un luth ont un rendement très médiocre, ce qui était déjà noté par Virdung (Musica Getutscht, Bâle 1511). Pour palier ce défaut, on tord plusieurs cordes de boyau d’un faible diamètre ensemble et le résultat est une corde plus épaisse mais aussi beaucoup plus élastique, et dont le rendement sonore est très amélioré : c’est ce que les anglo-saxons nommaient “catlin”.
Un document découvert assez récemment par Ian Woodfield prouve que cette technologie fut bien pratiquée autrefois. Mersennes mentionne d’ailleurs en plusieurs endroits de son Harmonie Universelle (1636) que les cordes harmoniques étaient fabriquées par des “cordiers”. Ce terme a parfois été compris comme désignant la même corporation que les fabricants de cordes de chanvre. On aurait pu traduire ce mot par fabriquant de cordes, ce qui dans le contexte des cordes pour instrument de musique aurait été une traduction plus vraisemblable.
La langue française ne fait pas de distinction entre corde (harmonique), string en anglais, et les autres cordes, ropes en anglais.
Sont aussi apparues récemment des cordes de boyau alourdies artificiellement par imprégnation de sels de métaux lourds. Cette technologie, pour efficace qu’elle soit, ne repose sur aucun document historique permettant de penser que nos ancêtres l’aient pratiquée.

(1) Une des premières mentions de cordes filées figure dans Introduction to the skill of musick, de JohnPlayford, 1664.


QUELLES CORDES METTRE SUR VOTRE LUTH ?

« La première chose à considérer est la taille de votre luth ; secondement, ce dont il est fait et sa résistance.
Si c’est un grand luth, il doit avoir des cordes d’un plus fort diamètre ; si c’est un petit luth, d’un diamètre plus faible.
Si c’est un luth de facture plutôt forte, il devra avoir des cordes épaisses, mais s’il est léger et fragile il lui faudra des cordes fines. Si votre luth est fragile, vous aurez intérêt à le régler à un diapason plus bas (lower pitch), parfois. [...]

La première des choses est de faire attention à choisir de bonnes cordes, qui devront être de trois sortes : “minikins" [Munich ?], “venice-catlins” et “Lyons” (pour les basses). Il existe encore une variété de cordes que l’on nomme “pistoy basses”[Pistoia est une ville de Toscane] qui, me semble-t-il, ne sont autres que d’épaisses “venice-catlines", habituellement teintées de rouge foncé profond.
C’est évidemment ce qui se fait de mieux pour les basses, car elles sont régulières et bien torsadées (well-twisted), mais elles sont difficiles à se procurer ; heureusement dans une “botte” de corde de Lyons, on peut en trouver (avec de la perspicacité) quelques-unes qui conviendront fort bien.
Parmi ces trois catégories, vous choisirez pour la chanterelle, le second chœur, le troisième et certaines doublures (en particulier le 6e chœur) dans vos “minikins". Pour les 5e et 6e chœurs ainsi que pour la plupart des autres doublures, vous prendrez des “venice catlins".
Vous n’utiliserez vos “pistoy” ou vos “Lyons” que pour les cordes basses les plus graves. »

(Extrait de Thomas Mace, Musick’s Monument, Londres, 1676).

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